Du 10 au 14 juillet, en partenariat avec l’ADAMI et la SACEM, Cultureveille est à Avignon pour suivre les débats de la Maison Professionnelle du Spectacle Vivant et vous propose tous les jours le live-tweet des débats organisés par La Scène, leur compte-rendu et des interviews en vidéo.
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Où sont les artistes avant que l’usine ferme ? – Débat Maison Pro à Avignon
La culture est un outil d’émancipation. Artistes et créateurs invitent leurs publics à imaginer un avenir différent, meilleur, à s’affranchir du carcan que leur ont assigné leur naissance, leur éducation ou leur vie professionnelle. Dès lors, on comprend qu’une partie du monde de l’entreprise voit d’un mauvais oeil les tentatives d’ingérence de la culture dans les rouages huilés de l’entreprise. Quel rapport entretiennent donc ces deux mondes ? C’était le sujet du débat « Emancipation, Culture et Monde du Travail » de ce matin.
« Ceux qui s’occupent de faire fonctionner les entreprises refusent qu’on ait, au travail, d’autres préoccupations que celle de la productivité ». C’est par cette affirmation que Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, ouvre le débat. Rationaliser l’organisation du travail pour produire plus passe souvent par la suppression des temps de pause et des espaces de dialogue (la fameuse machine à café). Les échanges au travail sont chronométrés et organisés par les directions d’entreprise. Or, sans temps de parole et d’échange, quel espace pour la culture ?
La méfiance du monde de l’entreprise vis-à-vis de la culture et de l’art va au-delà des seules considérations productivistes. Si les patrons considèrent avec méfiance l’intrusion du culturel dans l’entreprise, c’est aussi qu’il est porteur d’une menace de remise en cause de l’ordre établi. « Le travail va mal » nous confie Eddy Combret, trésorier général adjoint de la CCAS – les Activités Sociales de l’Energie. Et quand, selon ses termes, travailler est une « souffrance », les portes de l’entreprise se ferment aux artistes, qui risqueraient d’en renvoyer une image peu flatteuse. Bruno Lajara, metteur en scène et fondateur de l’Envol – Centre d’Art et de Transformation Sociale d’Arras, rappelle qu’au « moment des grandes luttes sociales, les artistes se sont emparés de ces questions-là »… Au risque d’attiser les mécontentements ? Un spectateur fait remarquer qu’il y a une « politique d’isolement du salarié ». Les patrons semblent considérer la culture, les échanges et la collectivité comme un terreau dangereux de questionnement de la domination des salariés par le patronat.
Interview de Philippe Martinez à la Maison Professionnelle du Spectacle Vivant à Avignon
Emanciper le salarié : voilà un combat pour lequel la culture a souvent fait cause commune avec le syndicalisme. Eddy Combret souligne que « le syndicalisme n’est pas qu’un monde de cris et de lutte. C’est aussi un monde d’idées« . Les ouvriers eux-même, dès le 19ème siècle, ont compris les avantages que leur donne l’accès à la culture. « La première action des premiers ouvriers syndicalistes a été d’acheter des livres pour apprendre à lire, afin d’être à même de comprendre leurs contrats de travail et ne pas se contenter de les signer d’une croix ». Une bonne partie de l’action des comités d’entreprise – ces espaces de démocratie défendus par les syndicats – est d’ailleurs tournée vers un meilleur accès à la culture : places de théâtre, concert, cinéma, musée…

L’action des syndicats et des CE suffit-elle à apporter cette nécessaire culture dans l’entreprise ? Pour Eddy Combret, il y a des « injustices dans l’accès aux arts et à la culture. Prenons l’exemple des spectateur du In à Avignon : 70% d’entre eux sont au moins bac+3, et parmi ceux-ci, 50% ont un bac+5. » Selon Philippe Martinez, « beaucoup se disent que le théâtre, les arts et la culture, ce n’est pas pour eux ». Pour attirer alors ces salariés vers la culture, il faut que la culture aille au-devant d’eux pour les amener à déconstruire ces préjugés. Nicolas Naudé, directeur de Travail et Culture, organise des projets qui font se joindre le monde de la culture et celui du travail. Ainsi, il suscite des temps de rencontre avec les artistes, qui permettent aux ouvriers de s’exprimer. Il cite l’exemple de deux grutiers qui, via des ateliers avec un réalisateur, ont créé un court métrage « de l’Art d’être Grutier ».
Finalement, l’art et la culture pourraient bien être une solution aux fractures que l’on observe dans le monde du travail. Philippe Martinez l’affirme : « pour bien faire son travail il faut de la liberté de création, qu’on soit ouvrier ou ingénieur« . Bruno Lajara appelle à une « participation collective des travailleurs à la création, au changement de regard sur le monde. » Il cite le travail qu’il mène à l’Envol, qui aide des jeunes chômeurs à considérer autrement le travail et à retrouver le chemin de l’emploi. Et Eddy Combret ajoute : « le travail ne doit pas être qu’un lieu de souffrance. Ce doit être un lieu d’épanouissement, et l’art et la culture peuvent nous y aider« .
Interview de Bruno Lajara à la Maison Professionnelle du Spectacle Vivant à Avignon
Ne serait-il alors pas temps de dépasser le clivage travail / culture ? Il est vrai que la sphère culturelle et artistique donne souvent du travail une image bien noire. Les artistes ne s’intéressent à l’entreprise que lorsqu’un drame s’y noue. Bruno Lajara reconnaît cet état de fait. « Pour qu’il y ait un spectacle il faut qu’il y ait conflit » dit-il, citant même son premier spectacle, 501 Blues, qui s’intéressait à une ouvrière licenciée de chez Levi’s. « L’art est instrumentalisé. Où sont les artistes avant que l’usine ferme ? Quand ces drames sociaux se jouent, on crée un spectacle : toute la presse parle du spectacle et pas de la fermeture ». « En tant qu’acteur culturel, de quoi sommes-nous caution ? » interroge Nicolas Naudé. « Nous ne rendons compte que de la partie du monde du travail qui est en train de mourir. Il y a une autre piste, plus subversive peut-être : c’est celle qui consisterait à parler du travail lui-même comme d’un outil positif d’épanouissement. »
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